Un article de FRANCIS VAN de WOESTYNE mis en ligne sur libre.be
Verhofstadt et Vande Lanotte ont fait preuve d'une négligence coupable. Mais DHL exerce un chantage cruel. Faut-il qu'un gouvernement s'y plie?
On a beau se dire que tout a été mis en oeuvre pour trouver une solution honorable au dossier DHL, la tournure que semblaient prendre les événements, mardi soir, avait de quoi laisser plus d'un Belge perplexe.
Ainsi donc, il a fallu attendre quasiment le tout dernier jour de la négociation pour aller s'assurer des engagements de la société de courrier express à deux niveaux: la création d'emplois, d'une part, le remplacement progressif de la flotte DHL -constituée principalement de vieux coucous bruyants- par des avions plus silencieux, de l'autre.
On ne peut s'empêcher de s'interroger. Fin 2003, début 2004, le gouvernement belge avait été officiellement saisi d'une demande de la société DHL qui souhaitait étendre ses activités à l'aéroport de Zaventem. On citait alors des chiffres mirobolants allant jusqu'à 10000 emplois créés. Pour apaiser alors la colère de ceux qui avaient vite traduit ces emplois en vols de nuits supplémentaires, le gouvernement, lors d'un conseil-événement organisé au château de Petit-Leez, décida de confier la problématique DHL à un groupe d'études. La décision fut reportée au mois de septembre. Cela paraissait tellement loin.
Tête baissée
Puis on s'est retrouvé début septembre avec un Premier ministre prêt à en découdre avec la terre entière, décidé à boucler, en quelques jours, sa déclaration de politique fédérale, la scission de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde, le budget 2005 et... le dossier DHL.
Après de vaines discussions institutionnelles, Guy Verhofstadt a été contraint de renoncer à anticiper sa déclaration politique au Parlement. Cela n'a pas été simple. Plus têtu qu'une mule, le Premier ministre a finalement craqué sous la pression de la vice-Première ministre Laurette Onkelinx qui, du haut de la tribune du congrès socialiste, lui conseilla gentiment, un dimanche matin, d'attendre.
Le gouvernement s'est alors jeté tête baissée dans la négociation DHL, d'abord en réservant la discussion aux ministres fédéraux puis en l'étendant aux gouvernements régionaux concernés, le flamand et le bruxellois. Mais une fois le compromis fédéral atteint, les intérêts contradictoires des Régions ont bloqué une négociation qui s'est éternisée de jour en jour.
Surréaliste
Ainsi, aussi incroyable que cela puisse paraître, trois gouvernements sont restés quasiment paralysés, suspendus à cette négociation pendant plus d'une semaine. Jusqu'à ce que, lundi soir, on se préoccupe (enfin!), des garanties que DHL pouvait réellement offrir.
Et hier, on a assisté à une journée carrément surréaliste. Envoyé chez DHL, le matin, pour connaître les intentions réelles de la société, le vice-Premier ministre socialiste flamand, Johan Vande Lanotte, est revenu penaud: «We zijn in de pataten», s'est-il exclamé face à ses collègues médusés. Les engagements de DHL avaient fondu comme neige au soleil: il reste une vague promesse de 1400 emplois à l'horizon 2008. Pire, la société a refusé de promettre un renouvellement de sa flotte. Après des réunions, autant de rumeurs et de démentis, le gouvernement fédéral a finalement décidé de renvoyer le Premier ministre en personne et son vice-Premier, Johan Vande Lanotte, afin qu'à deux ils entendent la triste réalité. Rarement un gouvernement se sera ainsi traîné au pied d'une société.
Quel gâchis! Les deux principaux ministres concernés, MM.Verhofstadt et Vande Lanotte, contrecarrés par des pouvoirs régionaux aux intérêts divergents, ont fait preuve d'une négligence coupable. Mais il est clair que la société DHL a exercé, et exerce encore, un chantage particulièrement cruel. Un gouvernement doit-il s'y plier à n'importe quel prix?
© La Libre Belgique 2004
AvertissementL'asbl EPURES continue son parcours comme association environnementale.
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