Source : Portail Santé - Environnement
Vidéo en langage des signes et texte.« Silence ! » intimaient les maîtres d'école dans leur classe. Silence dans les rangs. Silence sur toute la ligne, se taire, ne rien dire. Passer sous silence les erreurs, les fautes, les malversations. Faire silence. Imposer le silence. Garder le silence.
« Le silence est l'expression la plus parfaite du mépris » disait aussi George Bernard Shaw. Que fait-on tant dire au silence.
Le silence est-il à ce point pesant, le silence est-il à ce point symbolique qu'il nous faille le briser en mille morceaux. Fait-il à ce point peur qu'il nous faille le remplir. L'humoriste Ferdinand Bac affirmait que selon lui « Pour certains citadins la campagne est intolérable parce que son silence rejoint leur vide intérieur. »
Est-ce cette angoisse du vide, cette peur enfantine qui nous faisait chanter la nuit dans les bois pour conjurer les mauvais esprits ou pour affirmer sa force qui nous pousse dans le vacarme ? La rage d'un moteur devient-elle le cri du guerrier, le haka du rugbyman, l'expression de la puissance ou de l'impuissance ? Est-ce cela qui nous pousse à meubler le silence, en style Ikea ou Louis XV, peu importe ? A combler les blancs d'une conversation au contraire de ce qui se fait dans d'autres cultures ?
Jacques Attali écrivait que « La musique d'ambiance n'est pas innocente. Elle n'est pas qu'une façon de dominer les bruits pénibles du travail. Elle peut être l'annonce du silence général des hommes. ».
Cette étrange relation que nous avons avec le bruit et le silence nous mène aussi à des conduites paradoxales. Comme refuser que l'on tonde le dimanche, mais accepter de voler dans un ULM aussi bruyant. Comme nier les effets de notre tapage parce que chez soi, on fait ce que l'on veut et se sentir agressé par le mutisme des autres. Comme ignorer sa part de responsabilité dans le vacarme ambiant.
Que de craintes, de transes, de trouilles, pour quelque chose pourtant de si doux comme la caresse d'une main ou le sourire d'un enfant, si inspirateur de nos rêves, cocon de notre imagination. « La véritable musique est le silence et toutes les notes ne font qu'encadrer ce silence. » disait Miles Davis.
Que de craintes, de transes, de trouilles, pour ce silence rempli de vie, de bruissements, de soupirs, de respiration, du bruit de pluie et des caresses du vent, d'un chant d'oiseau ou d'un aboiement lointain, de traces d'existence, du craquement d'un feu et de la danse des flammes.
« Le paradis, c'est d'être assis à la terrasse un soir d'été et d'écouter le silence. » disait Alec Guinness
« C'est le tic-tac d'une pendule qui fait apprécier le silence. Sans ce tic-tac, on est un sourd. » écrivait Sacha Guitry.
Et c'est là mon appel, vous qui pouvez profiter de ce silence riche et vivant, respectez-le, aimez-le, rêvez-le, protégez-le. Ne le massacrez pas perpétuellement, par peur, par besoin de puissance, par égoïsme, par ignorance. Apprivoisez-le et il vous aidera à vivre, dernier refuge de la liberté.
- Florence Marion, Coordinatrice au CREE, Service de jeunesse spécialisé pour personnes sourdes et malentendantes.
- Denis Marion, Président de l'ASBL Trop de Bruit en Brabant wallon.